Economie de la connaissance

Dans les années 80, le gouvernement français bloquait les importations d’électronique grand public et freinait des quatre fers au développement de l’informatique. Tout ça pour sauver des emplois. Mais le chômage continuait à augmenter.

Et pourtant nous n’avons jamais eu autant d’emplois. Même au plus fort des trente glorieuses. À l’époque la majorité des femmes ne travaillaient pas, les handicapés avaient l’interdiction de travailler et les artistes vivaient encore de leur art. Paradoxe. Et la croissance a fini par atteindre les 1,5%.

Par contre, à contrario de d’autres pays nous n’avons pas investi aussi massivement dans l’enseignement supérieur et la recherche. Edmund Phelps, prix Nobel d’économie a démontré que justement les pays qui investissaient le plus dans ces deux domaines étaient ceux où le taux de chômage était le plus faible. Plus on investit dans la connaissance moins il y a de chômeurs, ce qui ne veut pas dire qu’il y a plus d’emplois. En fait la valeur ajoutée est dans la connaissance et plus dans la main d’œuvre. Contrairement aux matières premières, la connaissance est infinie. Et la connaissance se partage également. Plus la connaissance se diffuse, plus l’innovation se développe.

Du miracle économique coréen à la renaissance de Pittsburgh dans les années 90, l’économie de la connaissance a montré qu’elle pouvait dynamiser et servir de moteur. La connaissance crée suffisamment de richesses pour engendrer une croissance correcte qui permet d’avoir un haut niveau de développement sociétal et à un grand nombre de trouver voire de créer une activité.

Ceux qui ont envie d’avoir une activité différente en marge du système vont même y trouver leur compte. Si en Corée du sud des jeunes deviennent joueur de jeu vidéo professionnel ou auteurs de webtoons (Bd en ligne) c’est parce que la croissance est suffisante pour rentabiliser des activités qui permettent à ceux qui veulent vivre de leur passion de le faire. En comparaison chez nous la majorité des artistes ne vivent pas de leur art parce que la croissance est insuffisante pour leur permettre d’exister. Mais notre éducation, notre santé, notre recherche sont en crise. Nous n’arrivons pas à mettre en place une politique de lutte contre le réchauffement climatique ce qui engendre de nombreux populismes.

Quand on ne met pas la connaissance au centre du système, on cherche avant tout à maintenir de l’emploi. Or la main d’œuvre ne crée pas de valeur ajoutée. Et si l’on y réfléchit bien travailleurs qualifiés et non qualifiés ne sont pas comparables. Le travailleur non qualifié vend sa force de travail, c’est un esclave rémunéré. Le travailleur qualifié vend son expertise qui est un capital technique ou intellectuel, c’est un capitaliste. Donc l’économie de la connaissance favorise des travailleurs qui sont en fait des capitalistes. Ils deviennent la norme et l’esclave rémunérée l’exception.

En cherchant à maintenir l’emploi, on ne crée aucune valeur ajoutée. La croissance reste basse et ne permet pas un niveau de développement sociétal correct. Au lieu de créer de la valeur ajoutée qui va engendrer de la richesse qui sera porteuse de croissance et qui va permettre de créer de l’activité, l’on va soutenir les entreprises qui créent des emplois mais qui ne créeront pas de croissance, donc qui ne feront pas avancer l’économie. On génère des inégalités sociales. Les néolibéraux dégradent les conditions sociales pour maintenir un grand nombre de salariés. En ne favorisant pas la connaissance, nous entretenons une haine entre les travailleurs non qualifiés et ceux que Daniel Bell appelait les travailleurs du savoir. Cette haine va engendrer des populismes. Ces populismes vont amener à une haine des technologies considérées comme responsables de tous nos maux et une volonté de retours en arrière vers un âge d’or du plein emploi qui n’a jamais existé. D’un côté les décroissants qui veulent un monde sans technologie pour sauver l’environnement, de l’autre les réactionnaires qui souhaitent créer un monde conforme aux traditions où le travail représente le socle. Car pour maintenir l’emploi il faut maintenir une médiocrité éducative et culturelle. Malheureusement la place de la question du travail forme une sorte d’écran qui brouille la réflexion de beaucoup même parmi les plus intelligents.

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