Allocations logement (APL), de la poche du contribuable à celle des riches

Pour s’enrichir, les riches utilisent « l’effet de pompe » qui consiste à drainer l’argent des poches du contribuable vers les leurs par divers procédés, généralement sous couvert de social, d’écologie, etc…  L’APL, largement responsable des loyers élevés, en est un. Un concept porté par un irrépressible « socialwashing ». N’essayez surtout pas de faire comme moi et de les remettre en cause, vous seriez immédiatement à l’index de la société, taxé de pourriture capitaliste. Pourtant, c’était « l’inclassable » Raymond Barre qui l’avait introduite, une mesure qui n’avait rien de communiste donc…


Au sortir de la guerre, la France a besoin de logements et introduit l’ALF

C’est la célèbre « Loi de 1948 », qu’il vaut la peine de découvrir, qui est à l’origine des Allocations pour le Logement Familial, ALF. En gros, les loyers étaient encadrés depuis 1914. En 1948, ils étaient alors bien trop bas pour permettre l’investissement et la construction de logements était donc atone. La Loi de 48 a tout simplement levé l’encadrement des loyers sur les nouveaux appartements, au loyer forcément plus élevé puisque l’immeuble était neuf, il a alors été instauré une allocation pour aider à l’installation des démunis.

De fait, il devenait possible de bâtir et d’augmenter les loyers puisque les familles avaient alors les moyens de louer, grâce à l’aide de l’Etat.

C’est seulement en 1986 que la protection des loyers est levée

Officiellement, c’est la Loi du 23 décembre 1986  qui a mis fin à la protection des loyers des logements anciens garantis par la Loi de 48. À partir de cette date il n’était plus possible de relouer les logements vides soumis à la Loi de 48. Seuls les locataires déjà présents avant cette date pouvaient encore bénéficier du loyer protégé par la loi de 1914 qui encadrait les loyers.

Dans les faits, j’ai personnellement connu des gens, jusqu’à la fin des années 90, qui en bénéficiaient, essentiellement des jeunes, des étudiants. Concrètement, une personne âgée partait en maison de retraite, elle conservait son bail et « prêtait » le logement à son petit-fils. Ou lorsque les enfants étaient plus grands, les parents allaient prendre leur retraite à la campagne et conservaient le bail à destination de leur progéniture qui pouvait ainsi tranquillement faire ses études pour pas cher.

Pas cher, c’est pas cher…

Quand je dis « pas cher », je parle de grands logements, de 90m2, proches de Montmartre, pour…450FF/mois (si si). Et attention, tout confort : l’électricité (parfois, quand ça marchait), eau chaude, eau froide (même si l’eau froide coulait même robinets fermés et s’il n’était pas toujours évident d’avoir de l’eau chaude), chiottes communes sur le palier. Certains avaient même une douche, c’est dire.

Ces appartements étaient si recherchés que lorsqu’un jeune n’en avait plus besoin, il sous-louait à un autre moyennant commission, typiquement 2000FF, plus un surloyer. Mais même à 2000FF pour entrer plus une caution et un loyer à 800FF, à Paris, déjà à l’époque, ça restait une bonne affaire. Du coup, dans certains de ces logements vivaient, entassés, une dizaine d’étudiants co-locataires dans une joyeuse ambiance.

Raymond Barre introduit l’APL

L’APL, « Allocation Personnalisée pour le Logement » est introduite en 1977 par Raymond Barre. Son objectif? …Je vous le donne en mille : mettre fin à l’aide à la pierre que constituait l’ALF. Jusque-là, en effet, l’ALF servait à garantir que le logement serait loué, grâce à une aide aux locataires, de sorte que l’investisseur pouvait bâtir sans risque. Avec l’APL, c’est exactement le contraire, on permet à la famille de louer sans égard pour l’investisseur. C’est pareil, mais c’est le contraire.

L’APL est responsable de la hausse des loyers

Comme les loyers peuvent être plus élevés puisque compensés par les APL, les promoteurs peuvent vendre plus cher les appartements aux propriétaires qui les mettront en location en répercutant sur le loyer le prix d’achat trop élevé de leur bien et trouveront un locataire malgré le loyer plus élevé grâce aux APL.

Grâce à ce système, les promoteurs ont un rendement de leurs investissements absolument mirobolant. On construit un immeuble de 6 appartements (qui seront alors des appartements dits « sociaux », donc occupés par des locataires bénéficiant des APL) plus une attique (qui elle est un appartement haut-de-gamme non concerné par le dispositif), on vend l’attique et deux appartements, l’immeuble est payé, les quatre derniers appartements, c’est du bénéfice.

Et c’est comme ça pour tout. On bâtit un parchet de 15 villas mitoyennes bas-de-gamme, on en vend 10, les 5 dernières, c’est du bénéf. On bâtit un immeuble HLM de 100 logements, on en vend 70, les 30 derniers c’est du bénéf…

C’est juste de l’argent qui sort de la poche du contribuable pour aller tout droit dans celle des riches, un gigantesque détournement d’argent public, pas plus, pas moins.

Les petits propriétaires sont aussi floués que les locataires

Qui est pointé du doigt accusateur sur le prix du loyer? …Le propriétaire-bailleur, bien sûr. Pourtant, le propriétaire, lui, n’a généralement qu’un rendement ridicule, avoisinant les 4%. Le rendement locatif est très faible. Bien sûr, on peut se dire que 4%, c’est pas mal si on compare à un Livret A. Mais quand on sait qu’ils ne peuvent pas déduire les intérêts de leur emprunt alors que les loyers sont ajoutés à leur revenu et qu’on ajoute à cela le fait qu’il suffit d’une tuile imprévue pour faire du déficit, on comprend à quel point ils vivent sur le fil.

Non, les propriétaires ne peuvent pas baisser le loyer. Ils ont investi, sensibilisés par une propagande tapageuse bourrée de mot-clé alléchant « primo-accédant », « Prêt à taux zéro » (tiens, une autre pompe à fric en faveur des promoteurs, c’est l’Etat qui paie les intérêts avec VOS sous, pour que ceux qui n’en ont pas les moyens achètent quand même) en achetant à un promoteur. Quand vous leur dites qu’ils ont payé leur bien trop cher, ils ont le même regard brillant qu’une grenouille de bénitier à genoux devant la Sainte Vierge, convaincus d’avoir investi pour LEUR retraite et non pas celle du constructeur.

C’est également ce qui explique la différence de prix entre le neuf et l’ancien

Du coup, fatalement, l’ancien, ne subissant pas l’appétit des promoteurs soumis à la joie des APL, est un bon 15% à 20% moins cher que le neuf. Ce « 15% à 20% » étant tout simplement constitué des fameux 18% de rendement dont je parle plus haut.

Le coût de la construction est déterminé par le prix au mètre carré local. Exemple : les salaires des ouvriers qui bâtissent sont déterminés par le coût de la vie local. Donc des loyers élevés donnent des salaires plus élevés et donc un coût de construction plus élevé, qui détermine donc le prix au mètre carré local qui devient alors le prix de référence du marché. Il y a d’autres paramètres qui induisent des disparités microlocales comme un quartier est plus recherché  qu’un autre en raison de sa proximité avec les services ou son environnement. Un autre est plus cossu en raison d’une population traditionnellement plus riche. Un autre est dévalué en raison d’une insécurité, etc…

Tout ceci détermine donc un prix local du mètre carré…sur lequel le constructeur va pouvoir prendre son petit 18% grâce à vos impôts qui paient l’APL qui garantira au propriétaire qui a acheté trop cher de pouvoir louer quand même.

Les APL devraient être un acquis social, une aide ponctuelle

Le rôle du social c’est -théoriquement- d’assister les individus face à une tuile dans la vie, pas de les accompagner tout au long de leur vie en se substituant à un droit au revenu.

De fait, les APL devraient être une aide, ponctuelle, en cas de circonstances exceptionnelles. Aujourd’hui, lorsque vous avez un locataire qui se trouve un appart et qu’il dit : « malheureusement c’est un peu trop cher pour moi », on lui répond : « ne vous en faites pas, avec les APL ça va aller, on va vous aider à les obtenir, on est habitués ». C’est une situation complètement anormale de corruption de marché.

Le fait qu’elles soient systématiques en fonction du revenu a fait exploser les loyers et enrichi de manière outrancière les promoteurs.

Il est urgent de revenir sur ce dispositif aberrant et scandaleux

Les APL, c’est aujourd’hui 17 milliards par an dont une bonne part s’en va dans la poche des promoteurs, piochées sur le pouvoir d’achat des ménages, ce qui grève d’autant les rentrées fiscales.

Le gouvernement met en placeun dispositif de ciblage qui permettra de réaliser plusieurs centaines de millions d’euros d’économies en favorisant un accès à une catégorie de logements peu concernés par ce dispositif de pompage puisqu’il s’adresse aux étudiants, qui occupent essentiellement des studios.

Mais il est urgent d’aller plus loin, il y a des milliards à gratter sur le dos des riches qui s’enrichissent indûment.

Une intervention sur ce dispositif ne pourra être que douloureuse

De restreindre les APL va mettre des milliers de familles à la rue, parce que les propriétaires-bailleurs ne disposant pas de la capacité de baisser les loyers vont devoir accepter l’idée de perdre de l’argent. Certains vendront pour racheter moins cher, acceptant le sacrifice. D’autres étaleront leur prêt immobilier. Mais tous perdront et vont donc tenter de résister, ce qui aura pour effet d’un temps de latence durant lequel les loyers resteront inaccessibles aux familles mais à l’issue duquel, quelques sacrifices et quelques  faillites plus tard, qui profiteront surtout à ceux qui se sont grassement enrichis grâce aux APL de s’enrichir encore en rachetant ce qu’ils ont vendu moins cher que ce qu’ils l’ont vendu.

Ainsi, durant des années le contribuable aura  enrichi le promoteur…qui s’enrichira ensuite sur le dos des contribuables arnaqués sur le prix surfait du logement.

Vous noterez que le plus emblématique du secteur (nom masqué), aujourd’hui actif partout où il y a une opportunité, comme la téléphonie mobile, par exemple et pour dire n’importe quoi, n’aura pas mis longtemps à saisir tout le bénéfice qu’il y aurait à profiter de la Loi de 48, puisque l’entreprise a été fondée en 1952. 4 ans après seulement, belle réactivité…

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Auteur/autrice : Thierry Curty

Designer sociétal, inventeur d’un concept intégral économique, écologique et sociétal, co-fondateur de Courant Constructif, auteur, Fervent contemplateur de l’Humanité. De convictions profondes et à l’esprit libre. Passionné d’Économie, de Sociologie, d’Écologie, dans une vision holistique, l’épistémologie est le moteur de ma réflexion, source de ma conviction. Je soutiens la transition sociétale, inéluctable à terme, préalable incontournable des grandes transitions, écologique, énergétique, agrobiologique, qui en sont ses corollaires, et tente de l’expliquer et la dédramatiser, de faire passer le message que loin d’être une fin elle est un nouveau commencement, une solution aux problèmes que nous rencontrons aujourd’hui. Inéluctable, mais aussi nécessaire et souhaitable, confortable pour tous.

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